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Responsabilité Hospitalière et perte de chance : rappel

En matière de responsabilité hospitalière, la jurisprudence distingue deux types de préjudices : le dommage corporel subi et la perte de chance de voir son état s'améliorer ou ne pas empirer. Ces deux notions ont un impact majeur en termes indemnitaires puisque la perte de chance n'est jamais indemnisée à hauteur du préjudice corporel global.


C'est précisément ce que rappelle la Cour administrative d'appel de Douai dans une ordonnance de référé provision du 16 septembre 2019 portant sur une demande indemnitaire pour malvoyance profonde d'un bébé atteint de "rétinopathie du prématuré de grade cinq avec décollement bilatéral de la rétine".


Les parents de l'enfant estimaient que le Centre Hospitalier avait commis une faute en tardant dans la prise en charge et le traitement de leur enfant.


La Cour administrative d'appel donne raison aux parents sur l'existence d'une obligation non sérieusement contestable mais rappelle qu'en l'espèce le dommage indemnisable ne consiste pas dans le dommage corporel final mais dans la perte de chance de voir l'état de l'enfant s'améliorer ou ne pas s'aggraver.


C'est ainsi que la Cour administrative d'appel de Douai juge que :

" Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement, et qui doit être intégralement réparé, n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel, déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue".


Bien que la Cour administrative d'appel ne l'indique pas expressément, il est possible de décrypter cette ordonnance de la manière suivante : la Cour a pris acte de ce que la malvoyance profonde était en elle-même une conséquence logique de la pathologie touchant l'enfant et était sans lien avec le retard de prise en charge de l'hôpital. Il n'y a donc pas lieu à indemnisation de cette malvoyance puisqu'elle ne résulte pas d'une faute commise par l'hôpital.


Par contre, la Cour administrative considère que le niveau de malvoyance de l'enfant aurait pu être moindre, ou à tout le moins ne pas s'aggraver, si l'hôpital avait pris en charge plus rapidement la pathologie de l'enfant. La Cour considère alors que la faute de l'hôpital a privé l'enfant d'une chance de voir son état s'améliorer ou, à tout le moins, ne pas s'aggraver.


Ce n'est donc pas l'état de santé final de l'enfant qui est considéré pour évaluer le préjudice mais une sorte de ratio entre l'état de santé probable de l'enfant dans des circonstances normales et son état définitif du fait des carences du Centre Hospitalier.


Il faut retenir que la notion de perte de chances n'est pas forcément aisée à déterminer et que son évaluation par le juge administratif revêt une certaine part d'aléa.


CAA Douai, 16 septembre 2019, req. n° 19DA00230  


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Crédit Photos : PublicDomainPictures



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